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Le Québec est parsemé de vastes étendues d’eau : des lacs, des ruisseaux, des rivières, un fleuve. Il est bordé par l’océan Atlantique et l’océan Arctique. La faune aquatique a progressivement colonisé ces eaux avec le retrait des glaciers, il y a quelque 10 000 ans. Une centaine d’espèces d’eau douce et à peu près autant d’espèces d’eau salée y sont indigènes; quelques espèces exotiques sont venues s’ajouter à cette faune, parfois de façon accidentelle, parfois à la suite d’une introduction volontaire. C’est ainsi que la truite arc-en-ciel – en réalité un saumon du Pacifique – a été introduite pour augmenter l’offre halieutique. Par contre, le gobie à taches noires est une espèce sans intérêt sportif ou commercial qui se répand peu à peu dans le Saint-Laurent après avoir été répertoriée dans les Grands Lacs. Sa présence découlerait du déversement des eaux de ballast des navires transatlantiques. Une seule espèce de poisson, d’ailleurs menacée, est endémique au Québec : le chevalier cuivré.
Certaines espèces sont dulcicoles, ne passant leur vie entière qu’en eau douce; d’autres sont strictement marines, tandis que quelques-unes effectuent des migrations entre l’eau douce et l’eau salée. Les espèces anadromes vivent généralement en eau saumâtre ou salée, mais doivent remonter vers l’eau douce pour s’y reproduire. Le saumon atlantique est l’espèce la plus connue qui adopte ce cycle de vie. On peut également mentionner l’alose savoureuse, le poulamon atlantique, que les gens appellent aussi « petit poisson des chenaux », l’éperlan arc-en-ciel et l’esturgeon noir. L’anguille suit un cycle inverse, passant la majeure partie de sa vie à croître en eau douce avant d’aller frayer en mer; voilà pourquoi on la dit catadrome.
La présence des animaux marins explique que, dès le 16e siècle, les Européens aient fréquenté assidûment les côtes atlantiques du Canada. Les mammifères marins faisaient certes l’objet d’une chasse pour l’extraction de l’huile, mais les poissons et, en particulier, la morue étaient aussi recherchés. Séchée et salée, celle-ci pouvait être conservée et ramenée en Europe. Plus tard, lorsque les établissements coloniaux devinrent plus permanents, les nouveaux arrivants apprirent rapidement des Autochtones à exploiter d’autres espèces. L’anguille d’Amérique est abondamment récoltée; on la capture à l’automne, près des rivages, avec de longues tentures. Les pêches à fascines autrefois utilisées étaient faites de perches de bois et de branches d’arbustes finement entrelacées. Elles ont été remplacées par des barrières, faites de matériaux plus facilement assemblables. Comme l’anguille peut se faufiler dans des espaces très restreints, la tenture devait être bien construite et entretenue. L’anguille se conserve vivante longtemps et se prête donc à des transports prolongés. Le saumon atlantique est aussi une espèce bien représentative du Québec qui a, durant une longue période, fait l’objet d’une pêche commerciale. L’élevage en captivité a remplacé l’exploitation des populations sauvages, sévèrement réduites. Le filet maillant, le chalut ou la palangre sont utilisés pour capturer plusieurs espèces marines telles que le hareng, le sébaste, des poissons de la même famille que la morue (l’aiglefin, la goberge) et des poissons plats (la plie, le turbot, le flétan). En eau douce, plusieurs espèces sont pêchées pour être vendues sur place ou préparées comme spécialités locales servies dans les restaurants. C’est le cas de la gibelotte des îles de Sorel, dont la recette intègre de la perchaude et de la barbotte.
Selon la région, plusieurs espèces d’eau douce exercent une attraction sur le pêcheur sportif. L’omble de fontaine, aussi appelée truite mouchetée, est certes l’espèce la plus répandue et la plus recherchée. Il faut cependant souligner le goût savoureux du doré, la combativité de l’achigan à petite bouche ou la voracité du brochet et de son proche parent, le maskinongé. L'alose savoureuse remonte le fleuve pour se reproduire et devient ainsi une proie aisément accessible. L’éperlan, la perchaude, la barbotte, le crapet-soleil, le poulamon atlantique et le corégone sont autant d’autres espèces capturées à la ligne ou au carrelet pour être consommées.
Les poissons du Québec doivent, pour leur perpétuation, satisfaire aux exigences vitales, telles que l’accès à la nourriture, à des abris, à des sites de reproduction (frayères) et la possibilité de circuler librement afin de répondre à différents besoins, qui changent selon les saisons et l’âge des poissons. Chaque espèce a ses besoins propres. Certaines espèces, plus tolérantes à la pollution et à la détérioration de leur habitat, prennent parfois la place d’espèces plus exigeantes lorsque le milieu de vie est dégradé à cause des interventions humaines. Les pollutions d’origine industrielle, municipale et agricole ont détérioré la qualité de l’eau du Québec méridional et grandement nui à la distribution et à l’abondance des espèces. Les modifications physiques apportées aux milieux aquatiques, telles que le remblayage, le dragage, la canalisation, la construction des barrages et les prélèvements d’eau, sont autant de pratiques qui ont privé les poissons d’habitats de qualité. Des efforts ont été entrepris, depuis quelques années, pour corriger les erreurs du passé, épurer les eaux et recréer des habitats plus productifs. Lorsqu’ils sont exploités, les poissons offrent une valeur économique appréciable qui justifie les investissements nécessaires à la restauration de leurs habitats. Par ailleurs, ils servent aussi d’espèces sentinelles pour évaluer la qualité de l’environnement dans lequel l’humain évolue également.